(Français) Aides d’État: la France doit récupérer 8,5 millions d’euros d’aides illégales octroyées à Ryanair à l’aéroport de Montpellier
La Commission européenne est parvenue à la conclusion que les contrats de services de marketing conclus entre l’Association de promotion des flux touristiques et économiques (APFTE) et Ryanair à l’aéroport de Montpellier sont illégaux au regard des règles de l’UE en matière d’aides d’État. Ryanair doit à présent restituer 8,5 millions d’euros d’aides d’État illégales.
Mme Margrethe Vestager, commissaire chargée de la politique de concurrence, a fait la déclaration suivante: «La concurrence entre aéroports et entre compagnies aériennes revêt une importance fondamentale pour les consommateurs, la croissance et l’emploi.Il ressort de notre enquête que certains paiements effectués par les autorités locales françaises en faveur de Ryanair pour promouvoir l‘aéroport de Montpellier ont donnéà Ryanair un avantage déloyal et sélectif sur ses concurrents et porté préjudice à d’autres régions et aéroports régionaux, ce qui est illégal au regard des règles de l’UE en matière d’aides d’État. À présent, la France doit récupérer les aides d‘État illégales.»
L’aéroport de Montpellier est un aéroport régional situé dans la région française de l’Occitanie. Près d’1,9 million de passagers y ont transité en 2018. Ryanair y était présent jusqu’en avril 2019.
À la suite d’une plainte déposée par un concurrent de Ryanair, en juillet 2018, la Commission a ouvert une enquête approfondie concernant les contrats de services de marketing conclus entre l’Association de promotion des flux touristiques et économiques (APFTE), d’une part, et Ryanair et sa filiale AMS, d’autre part.
Entre 2010 et 2017, l’APFTE a conclu différents contrats de marketing avec Ryanair et AMS, en vertu desquels ces dernières ont reçu des paiements d’un montant de quelque 8,5 millions d’euros en échange de la promotion de Montpellier et de la région environnante en tant que destination touristique sur le site web de Ryanair.
L’enquête de la Commission a révélé que:
- les contrats conclus avec Ryanair étaient financés au moyen de ressources d’État et étaient imputables à l’État. L’APFTE est une association indépendante de l’exploitant de l’aéroport, financée presque intégralement par des entités publiques françaises régionales et locales. Ces entités publiques contrôlent de près l’utilisation du budget de l’association.
- Les paiements effectués en faveur de Ryanair sur la base des contrats de marketing ne correspondaient pas à des besoins de marketing réels de l’APFTE mais servaient uniquement de mesure incitative pour que Ryanair maintienne ses activités à l’aéroport de Montpellier.
- L’APFTE soit concluait des contrats directement avec Ryanair et AMS à l’exclusion d’autres compagnies aériennes, soit organisait des appels d’offres publics qui favorisaient Ryanair.
Sur la base de ces constatations, la Commission a conclu que les contrats de marketing conféraient à Ryanair un avantage indu et sélectif sur ces concurrents, qu’ils équivalaient à des aides illégales et incompatibles au regard des règles de l’UE en matière d’aides d’État et qu’il devait être procédéà la récupération de cet avantage.
Récupération
En principe, les règles de l’UE en matière d’aides d’État requièrent que les aides d’État incompatibles avec le marché intérieur soient récupérées afin de supprimer la distorsion de concurrence qu’elles ont engendrée. Elles ne prévoient pas d’amendes et la récupération ne pénalise pas l’entreprise en cause. Cette récupération sert simplement à rétablir l’égalité de traitement avec les autres entreprises.
La France doit à présent récupérer auprès de Ryanair les aides d’État illégales, dont le montant s’élève à environ 8,5 millions d’euros.
Contexte
Dans le secteur de l’aviation, les lignes directrices de la Commission sur les aides d’État aux aéroports et aux compagnies aériennes (voir aussi le MÉMO) rendent compte du fait que, sous réserve de certaines conditions, des subventions publiques peuvent être utilisées par les aéroports régionaux ou les autorités régionales pour attirer vers un aéroport donné des compagnies aériennes sensibles au facteur prix. Généralement ces subventions prennent la forme de redevances aéroportuaires peu élevées, de remises de redevances aéroportuaires, de commissions liées aux résultats («success fees») ou d’incitations financières octroyées aux compagnies aériennes sous la forme de rémunérations pour des services supposés, principalement des services de marketing.
Les autorités publiques ou les aéroports publics régionaux peuvent proposer des conditions attrayantes aux compagnies aériennes afin de stimuler leur trafic. Cependant, ces conditions ne doivent en principe pas aller au-delà de ce qu’un exploitant aéroportuaire guidé par la recherche d’un profit serait prêt à offrir dans les mêmes circonstances (principe de l’investisseur en économie de marché). Si ce principe n’est pas respecté, les conditions offertes aux compagnies aériennes constituent des aides d’État.
Au cours des dernières années, la Commission a menéà bien plusieurs dossiers concernant des aides en faveur de compagnies aériennes destinées à attirer celles-ci ou à maintenir leur capacité en matière d’aéronefs dans certains aéroports, et a constaté que ces aides n’étaient pas compatibles avec les règles de l’Union en matière d’aides d’État, par exemple en ce qui concerne les aéroports de Nîmes (dans la zone de chalandise de l’aéroport de Montpellier), de Pau et d’Angoulême en France, deZweibrücken et d’Altenburg-Nobitz en Allemagne et de Klagenfurt en Autriche, ainsi que les aéroports sardes de Cagliari, d’Olbia et d’Alghero en Italie.
Par ailleurs, la Commission examine actuellement de nouveaux contrats conclus entre les autorités publiques et des compagnies aériennes dans certains aéroports régionaux, par exemple l’aéroport allemand de Francfort-Hahn ou les aéroports espagnols de Reus et de Girona.
La Commission considère que ces mesures peuvent entraîner de fortes distorsions de concurrence en ce qui concerne les liaisons intra-UE du marché paneuropéen du transport aérien, hautement concurrentiel. De plus, de telles mesures peuvent désavantager les régions ou aéroports qui ne recourent pas à des aides d’État illégales pour attirer des compagnies aériennes.
La version non confidentielle de la décision sera publiée sous le numéro SA.47867 dans le registre des aides d’État figurant sur le site web de la DG Concurrence, dès que les éventuels problèmes de confidentialité auront été résolus. De plus amples informations sur la politique de la Commission en matière d’aides d’État dans le secteur du transport aérien sont disponibles dans une note de synthèse «Competition policy brief».